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Pourquoi embellissez-vous votre image en ligne ?

Frederik Hautain

Pourquoi embellissez-vous votre image en ligne ?

Mediapsycholoog Mischa Coster

Vous vous créez une image plus positive sur Facebook ? Que vous le fassiez consciemment ou non, cela n’a rien d’étrange. Le psychologue des médias Mischa Coster élucide le pourquoi de ce phénomène et explique pourquoi les réseaux sociaux se sont si rapidement ancrés dans notre société. 

Comment devient-on « psychologue des médias » ?
En étudiant la psychologie [rires]. J’ai longtemps cru que j’étais prédestiné à devenir psychologue clinicien, mais pendant mes études, un nouveau master a vu le jour : la psychologie des médias, quelque chose de totalement différent de la psychologie sociale ou clinique. À cette époque, j’étais déjà passionné par internet et les effets des médias sur le comportement humain. J’ai donc fait de mon hobby mon métier.

Notre comportement online diffère-t-il radicalement de notre comportement offline ?
Aux USA, une récente étude sur les traits de personnalité a révélé qu’il n’y a presque pas de différence entre la façon dont les gens voient les autres dans un environnement en ligne – Facebook dans le cas de cette étude – et en dehors. Les traits de personnalité que les observateurs attribuent à ces personnes, tant online qu’offline, sont plus ou moins cohérents.

Comment créer une identité en ligne ? Même si notre comportement online et offline diffère à peine, nous partageons principalement des informations positives sur nous-mêmes via Facebook.
C’est vrai, c’est ce que les gens ont tendance à faire. En psychologie, on appelle cela le paradigme d’autoprésentation. Si vous me demandez « comment vas-tu ? » dans un bar, je répondrais probablement « bien », même si j’ai mal à la gorge.

Nous nous présentons donc positivement tant offline qu’online. Le problème est que l’on peut embellir cela en ligne, avec des émoticônes, des hashtags, des images, des vidéos, etc. Les personnes qui vous suivent peuvent alors penser : ce type a une vie fantastique ! C’est parce que les gens ne voient qu’un aspect : il est dans un bar, il mange des sushis, il est en vacances, il essaie une voiture neuve...

Comment expliquez-vous que les réseaux sociaux soient devenus partie intégrante de notre vie quotidienne en si peu de temps ?
C’est dû à notre tendance à rester en contact. Les gens sont vraiment des êtres sociaux. Les réseaux sociaux répondent au désir de contact social, rencontrant ainsi un besoin humain fondamental. C’est pourquoi les gens s’en donnent à cœur joie et laissent les réseaux sociaux entrer dans leur vie.

Une autre raison est que nous mesurons en partie notre sentiment de bien-être par rapport aux personnes qui nous entourent. Si, par exemple, nous ne voyons que des gens heureux dans un restaurant, nous nous sentons parfois un peu plus tristes, parce que les autres sont plus heureux que nous. Ou inversement : si nous voyons surtout des gens à l’air sérieux, cela peut nous rendre encore de meilleure humeur.

Un environnement de réseau offre beaucoup plus de possibilités de voir ce que les autres font, ressentent et vivent. Les réseaux sociaux renforcent considérablement notre besoin fondamental de comparaison sociale, avec lequel nous déterminons si nous sommes « heureux » ou « malheureux ».

Estimez-vous en général que les entreprises ont pleinement conscience de l’influence des réseaux sociaux et qu’elles utilisent cette influence pour créer des produits, des services ou du contenu ?
Certaines entreprises utilisent déjà les réseaux sociaux assez efficacement, en tout cas pour communiquer avec leurs clients ou leurs parties prenantes. En ce qui concerne la véritable co-création – j’entends par là la création de nouveaux produits en collaboration avec vos clients et fournisseurs et toute la communauté à laquelle appartient votre entreprise – il est possible d’aller bien plus loin.

Il y a pourtant une réelle valeur à en tirer. La co-création offre aussi aux entreprises l’opportunité de créer de nouvelles choses, auxquelles un large public se sent immédiatement connecté. Lorsque je crée quelque chose avec une entreprise, je me sens copropriétaire et coresponsable. Lorsque notre co-création est commercialisée, il y a de fortes chances que je la soutienne et que je la partage même avec mon réseau.

Pourquoi la co-création n’a-t-elle pas encore le succès que l’on pourrait espérer ? Les entreprises ont-elles peur de renoncer à leur contrôle en impliquant le public dans de nouveaux projets ?
Le contrôle est en effet très important pour les entreprises. Non seulement en ce qui concerne la co-création, mais aussi les réseaux sociaux en général. De nombreuses entreprises ne veulent toujours pas utiliser les réseaux sociaux parce qu’elles ont peur de perdre le contrôle. Elles ne se rendent pas compte que les gens parlent déjà d’elles – sans qu’elles n’en sachent rien.

Pour en revenir à la co-création : avec les connaissances, l’expertise et l’expérience de vos clients et partenaires, vous pouvez ajouter une vraie valeur. Pour garder le contrôle sur le processus de développement de nouveaux produits ou services, précisez clairement la place et le rôle de vos partenaires dans ce processus.

Qu’est-ce qui pousse les consommateurs comme vous et moi à co-créer avec une marque ?
C’est la question à un million. Cela tient au fait que nous aimons être engagés dans des marques que nous aimons. La co-création est le moyen ultime d’être impliqué par ces marques et d’être entendu. Beaucoup de grandes marques ont quelque chose de magique, n’est-ce pas ? Apple, par exemple : je peux l’utiliser comme marque, mais je ne peux pas me rapprocher de l’organisation. Sauf si je suis co-créateur : alors, tout à coup, je me retrouve au cœur de l’organisation. Faire partie d’une marque, au lieu d’être un simple fan, ambassadeur ou utilisateur, cela explique à peu près tout.

Quelle est l’importance de facteurs tels que la réputation et l’autorité pour une entreprise qui vise un grand nombre d’adeptes – en ligne et dans la vraie vie ?
Plutôt important. Mais attention, ce n’est pas la même chose. Vous gagnez une réputation, vous devenez une autorité parce que d’autres vous octroient ce statut. L’autorité est donc un élément crucial dans le processus décisionnel des gens.

Lorsque les gens hésitent entre des marques, ils regardent deux aspects. Premièrement : cette marque ou cette personne en sait-elle plus que moi à ce sujet ? En d’autres termes : cette marque est-elle une autorité ? Ou : que me dicte une autorité ? Deuxièmement, les gens se demandent ce que font les autres personnes dans la même situation ? C’est ce qu’on appelle le principe de la preuve sociale.$

Si une marque ne compte pas encore beaucoup d’adeptes, elle peut difficilement utiliser cette preuve sociale pour en obtenir davantage. Pour persuader les gens de faire partie de la marque, il est donc préférable d’essayer d’atteindre une espèce de statut d’autorité. Cela peut se faire via une marque externe, un auditeur externe ou un professeur qui la recommande.